Psy Paris 16

Ca veut dire quoi, être normal ?

Ca veut dire quoi, être normal ?

Nous avons beau être très attachés à l’idée de ne pas être comme Monsieur ou Madame Tout-le-Monde, reconnaissons-le : nous sommes tous profondément influencés par ce que notre société considère comme normal. Mais qu’entendons-nous vraiment par « être normal » ? C’est là tout le problème, explique le philosophe Alain de Botton de la School of Life.

 

 

Pourquoi accordons-nous tant d’importance à ce que nous entendons par « être normal » ? Avant tout parce que nous sommes des créatures collectives ! Nous demeurons extrêmement réceptifs aux dynamiques de groupe, et sensibles à la manière dont nous nous intégrons ou non.

Quelle que soit l’importance que nous accordons à l’individualisme et à notre propre singularité, nous sommes en réalité profondément influencés par l’idée de ce que notre société considère comme « normal ».

C’est bien là le problème, puisque notre idée de ce qui est normal est en fait, bien souvent, très éloignée de la réalité.

Bien des choses que nous considérons comme bizarres, déconcertantes, étranges – et qui, nous l’imaginons, nous éloignent des autres – sont en réalité complètement banales et très répandues :

Si…

• vous avez le sentiment d’avoir épousé la mauvaise personne

• le succès d’un ami vous rend malade de jalousie

• vous pensez au compagnon de votre soeur lorsque vous êtes au lit

• vous avez envie de pleurer dès que l’on vous critique

• vous n’aimez pas votre image

• vous paniquez à l’idée d’avoir une conversation avec un inconnu

• vous stressez à l’idée de péter en public

• vous craignez de vomir en pleine réunion à cause du stress

• vous dormez toujours mal à l’hôtel

• vous avez la voix qui faiblit ou chevrote lorsque vous devez parler à quelqu’un d’important

• vous avez peur de vous asseoir sur des toilettes sales

• vous trébuchez sur les aspérités du trottoir

• vous pensez à certains membres de votre propre famille de manière sexuelle

• vous vous cognez la tête en essayant de monter nonchalamment dans un taxi

• vous vous sentez attiré par des personnes étranges qui font l’actualité (le président russe par exemple)

• vous vous masturbez beaucoup

• vous vous considérez comme un imposteur

• vous stressez à l’idée de ne pas arriver aux toilettes à temps

• vous vous cognez dans les portes, les poteaux, les bornes et les rétroviseurs

• vous avez souvent peur que l’on puisse voir vos parties intimes

• vous craignez de postillonner sans le vouloir sur votre compagnon de table au restaurant

• vous craignez que les autres pensent que vous êtes un pervers

• vous pensez toujours à une relation qui s’est mal terminée il y a onze ans

… alors félicitations : vous êtes complètement normal.

 

Etes-vous vous-même ?  Comment savoir si l’on est soi-même ? Et, entre renoncements, ambitions et inhibitions, comment trouver sa voie ?

L’image de normalité véhiculée par notre culture est aujourd’hui définie de manière assez simpliste. Premier problème : cette vision accentue notre tendance à privilégier l’apparence – l’image que l’on renvoie aux autres – au détriment de l’intériorité, en nous suggérant qu’il est normal, par exemple, d’avoir une cuisine étincelante ou de partir en vacances à l’étranger chaque année.

L’autre grand problème, c’est que notre conception de la normalité a faussé notre perception de ce qu’est un être humain. Notre culture veut ainsi propager l’idée qu’un moi organisé, calme et raffiné est la façon d’être standard de la plupart des gens. Ce qui nous amène à nous impatienter, à nous sentir découragés lorsque nous ne sommes pas à la hauteur. Nous avons envie de crier que nous devons nous reprendre en main, nous ressaisir, arrêter d’être si faible ou si bizarre.

Mais plutôt que de vouloir à tout prix nous conformer à cette idée de normalité – celle d’un être calme, cohérent et rationnel – et de nous sentir honteux si nous n’y parvenons pas, mieux vaut reconnaître l’omniprésence et la complète normalité de la folie, de l’entêtement et de l’inquiétude qui caractérisent chaque être humain.

 

Source: Psychologies

 

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